Rencontre avec Frédéric Leroy

Président de Je Bouge pour mon Moral

photo de frédéric leroy

Pouvez-vous nous présenter votre organisation ?

Je bouge pour mon moral est une association d’intérêt général qui aide les personnes avec des troubles psychiques à se rétablir grâce à l’activité physique. Elle a été créée fin 2021 sur le constat que l’activité physique est un levier très fort de rétablissement personnel pour les personnes en souffrance psychique. Or, les cadres de pratique ne sont pas adaptés à leurs besoins et ressources. Après consultation de plus de 150 malades, avec une équipe d’une dizaine de bénévoles nous avons créé un programme de rétablissement des troubles anxiodépressifs que nous avons testé dans une phase pilote à Nancy avec 65 bénéficiaires à partir de janvier 22. Les résultats ont été si bons que nous avons obtenu l’agrément de l’ARS Grand Est. Nous avons recruté 4 salariés pour pérenniser notre activité à Nancy et Metz où nous accompagnons environ 400 bénéficiaires par an.

Notre programme de rétablissement s’étend sur 7 semaines et comprend de l’activité physique adaptée (marche nordique) 2 fois par semaine, un atelier de gestion du stress une fois par semaine et des webinaires sur les habitudes de vie (alimentation, sommeil, sport, psychologie positive). Nous tenons à donner un cadre collectif qui soit positif, professionnel et bienveillant. Notre démarche est résolument scientifique et nous sommes accompagnés par des chercheurs des universités de Reims et Grenoble pour concevoir nos actions et évaluer leur impact avec rigueur.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer ?

J’ai accompagné un de mes trois enfants dans une dépression et je me suis rendu compte que l’activité physique lui était très bénéfique mais difficilement accessible. Cela faisait longtemps que j’avais envie d’entreprendre avec un impact positif et je me suis dit que c’était une belle opportunité pour concrétiser mon désir d’aider.

Présentez-nous votre parcours.

J’ai travaillé pendant 25 ans en grande entreprise dont 20 ans chez Danone, dans 5 pays différents (Belgique, Portugal, Allemagne, Autriche, Suède) avec des fonctions de direction marketing et direction générale. J’ai beaucoup aimé gérer des équipes dans un contexte multiculturel et je me suis tout naturellement formé au coaching que j’ai exercé à titre bénévole et professionnel pendant quelque temps, avant de me dédier pleinement à la création et au développement de Je bouge pour mon moral il y a deux ans.

Décrivez-nous une journée type dans votre structure.

Mon temps est partagé entre coordonner les activités d’accompagnement de nos bénéficiaires, en lien avec les bénévoles et les salariés de l’association, travailler sur de nouveaux projets de développement (déploiement sur de nouveaux territoires, création d’un programme pour des jeunes, ..), rechercher des financements pour assurer notre développement et gérer des aspects administratifs. Une grande partie de mon travail consiste à prendre contact avec des partenaires potentiels, publics ou privés, car nous sommes encore une petite association et avons besoin de nous faire connaitre.

Quelques chiffres x impact ?

Nous accompagnons actuellement 400 personnes par an à Nancy et Metz. Concrètement, on mesure une réduction de plus de 50 % des symptômes dépressifs en 7 semaines et une amélioration nette de l’estime de soi pour l’ensemble des participants. Par ailleurs, l’accompagnement que nous proposons se passe en collectif et les bénéficiaires nouent fréquemment des liens d’amitié qui perdurent après le programme.  Notre ambition est de déployer notre accompagnement dans 40 territoires en 2026, pour accompagner en direct plus de 10 000 bénéficiaires par an.

Une belle histoire à raconter ? (Ex : témoignage d’un bénéficiaire)

Une bénéficiaire du programme pilote (janvier 2022) ne marchait plus depuis 3 ans suite à des problèmes de fibromyalgie et suite aux confinements. Nous avons dû la rappeler plusieurs fois pour la convaincre de commencer le programme car elle ne s’en sentait pas capable. Après une ou deux séances où elle a dû s’accrocher, elle a repris gout à marcher, à sortir de chez elle et à rencontrer d’autres personnes. Elle est devenue une des participantes les plus assidues, venant souvent aux séances avec de gentilles attentions pour les autres participants et les intervenants (gâteaux, thé à la menthe,…)

A la fin des 10 semaines, elle a pris l’habitude de sortir et marcher tous les jours. Elle supporte mieux ses douleurs liées à la fibromyalgie et vit une vie normale. Elle a même le projet de reprendre une activité professionnelle et de créer sa propre entreprise de service de traiteur !

Une citation/référence inspirante à partager ?

Les livres de Luc Vigneault, un Canadien pionnier du rétablissement en santé mentale. L’idée du rétablissement psychique n’est pas de revenir à l’état initial, mais d’apprendre à vivre avec la maladie, une vie pleine de sens. En se concentrant sur les buts importants de vie, au lieu de poursuivre le retour au passé, la personne est en mesure de mobiliser ses ressources propres pour un avenir positif. Cette notion permet d’arrêter d’identifier la personne à sa maladie et de comprendre que la maladie n’est qu’un aspect à prendre en compte parmi d’autres.

Un rêve pour l’avenir ? Où voyez-vous votre asso dans 5 ans ou 10 ans ?

Je rêve d’un monde où chacun quel que soit ses difficultés et ses handicaps (nous en avons tous) soit encouragé et soutenu à vivre une vie satisfaisante et pleine de sens. Plus concrètement, j’espère qu’un jour l’accompagnement des troubles psychiques par l’activité physique ne soit plus une exception mais une règle, et que chacun puisse bénéficier aisément d’actions d’aide au rétablissement basées sur l’activité physique.

J’espère que Je bouge pour mon moral participera à ce changement systémique en sensibilisant le grand public et les professionnels de santé. Nous allons inventer des accompagnements thérapeutiques innovants et changer le regard sur les malades, en les voyant comme des acteurs et non des patients.

Une rencontre marquante/décisive pour grandir ?

J’ai bénéficié de l’accompagnement de l’incubateur Ticket for change en 2021, et j’ai rencontré dans ce cadre-là des accompagnateurs et d’autres entrepreneurs sociaux qui m’ont beaucoup inspiré et permis de passer de l’idée de mon projet à sa réalisation, en prenant le risque de me lancer. Comme ils disent chez Ticket for change « Au pire ça marche » 

Un mot pour la fin ?

Je suis reconnaissant à tous les partenaires qui croient au potentiel d’impact de Je Bouge Pour Mon Moral et qui me soutiennent.

Ses réalisations