Rencontre avec Andreea Badea

Directrice de la Fondation de l’Engagement pour tous

photo d'andreea
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Pouvez-vous nous présenter votre organisation ?

La Fondation de l’Engagement pour tous veut permettre à chacune et à chacun de mettre son énergie au profit de l’intérêt général, en soutenant des projets citoyens ou associatifs. On est intimement convaincus que donner et faire le bien est un magnifique moyen d’être acteur de sa vie. C’est tout d’abord s’enrichir et se construire soi-même.  Alors on opérationnalise et on soutient des projets qui font passer l’engagement citoyen à l’échelle, pour un maximum d’impact.   

Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer ?

La conviction très profonde qu’on a toutes et tous des talents qu’on peut mettre au profit des autres. Les gens qui s’engagent sont les premiers gagnants. Ils renforcent leur confiance en eux-mêmes, ils trouvent du sens dans leur action, ils rencontrent des personnes qui partagent les mêmes valeurs de solidarité. Or, une minorité d’entre nous passe à l’action. Pas par manque d’envie, mais par sentiment d’illégitimité, et aussi en raison d’une certaine méconnaissance de l’écosystème associatif. Notre rôle est de rendre l’engagement facile et accessible à chacune et chacun. On sensibilise, on accompagne vers l’engagement, on reste en appui, et en aidant un grand nombre de gens à passer à l’action, on fait effet de levier.   

Présentez-nous votre parcours.

J’ai un parcours assez atypique, ponctué par de belles rencontres. Je suis arrivée en France quand j’avais 11 ans, en parlant à peine le français, après avoir passé mon enfance en Roumanie. J’ai été extrêmement bien accompagnée – tout d’abord par mes parents, formidables, puis par des enseignants qui m’ont mentorée. Outre des connaissances, c’est eux qui m’ont transmis les clés pour bien m’orienter dans le système éducatif français. J’ai beaucoup de gratitude à leur égard pour cela.

J’ai découvert l’engagement citoyen pendant mon apprentissage à la Fondation EY. Ma manager, Fabienne Marqueste, pilotait avec  passion le dispositif de mécénat de compétences des collaborateurs pour aider des artisans d’art. J’étudiais à Sciences Po à l’époque et j’hésitais entre plusieurs voies. J’ai eu envie de creuser le sujet de l’entrepreneuriat, je suis donc partie à San Francisco avec le Groupe SOS. J’étais volontaire de service civique et j’ai contribué à monter un restaurant d’insertion dans la Silicon Valley. De retour en France, j’ai travaillé pendant plusieurs années dans une start-up parisienne avant de partir co-fonder une entreprise de transport solidaire en Nouvelle Calédonie. Le projet de la Fondation de l’Engagement est arrivé trois ans plus tard. Cela s’est fait via une rencontre avec Félix, l’initiateur de Vendredi. Il a eu l’idée de cette Fondation et j’ai  su que ce serait un beau projet.

Sinon – et cela me définit aussi beaucoup – j’ai une seconde vie professionnelle (surtout les fins de semaine et les matins tôt!): je suis romancière.

Décrivez-nous une journée type dans votre structure.

L’équipe est en train de s’étoffer, donc en ce moment le quotidien est assez diversifié. On travaille sur la conception des nouveaux projets et leur financement. On gère également une partie de l’opérationnalisation du programme Transitions à Impact, qui aide les chercheurs d’emploi à faire de cette période de transition une opportunité pour s’engager au service de l’intérêt général. Cette opérationnalisation inclut un aspect sourcing des participants, via du marketing digital ou des partenariats associatifs, ainsi que des aspects d’animation et de mesure d’impact.

Quelques chiffres x impact ?

Dans le cadre de Transitions à Impact,  534 chercheurs d’emploi se sont engagés ces six derniers mois en effectuant des actions solidaires. En moyenne, une personne donne environ douze heures de son temps. Elle a accès  en quelques clics à près de 2500 actions solidaires: des parcours de sensibilisation au dérèglement climatique ou aux enjeux du handicap, de la distribution alimentaire, du mentorat auprès des plus fragiles  ou la possibilité de co-construire un projet citoyen en groupe. C’est un programme conçu pour aider les gens à reprendre confiance en eux-mêmes, à créer du lien et à envisager plus sereinement le retour en activité. Une fois qu’ils se sont familiarisés avec l’engagement, nombre de participants s’intègrent dans le quotidien, sur leur temps personnel. On voit que cela a vraiment un impact positif dans le temps.

Une belle histoire à raconter ? (Ex : témoignage d’un bénéficiaire)

J’ai eu au téléphone il y a quelques jours une jeune femme qui a dû arrêter de travailler pendant six ans pour élever seule son fils. Malgré leur situation de précarité, elle a eu le courage de reprendre une formation pour se reconvertir. Elle a des difficultés à trouver un emploi dans ce nouveau domaine, alors Transitions à Impact lui permet d’aider des associations avec ses nouvelles compétences de façon très qualitative en même temps qu’elle acquiert de l’expérience dans ce secteur précis et qu’elle construit son réseau.

Une citation/référence inspirante à partager ?

J’aime beaucoup la fameuse parabole du colibri. Cela invite à l’action et à l’humilité, dans son sens le plus noble. On n’arrive à surmonter l’incendie que de façon collective. De la même façon, les défis auxquels fait face aujourd’hui l’humanité sont colossaux. Je pense à la crise climatique, et à tous les défis sociaux et environnementaux qu’elle va exacerber. Or, “Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve.”  (Hölderlin). Je suis convaincue que si on parvient à se mobiliser ensemble, on va limiter les impacts négatifs de façon beaucoup plus certaine. Ça implique que chacune et chacun se sente compétent pour apporter sa pierre à l’édifice.

Un rêve pour l’avenir ou où voyez-vous votre asso dans 5 ans ? 10 ans ?

A horizon 5 ans, j’aimerais vraiment qu’on parvienne à avoir un impact systémique, en collaborant de la bonne façon avec les acteurs publics et associatifs concernés par l’engagement citoyen. Par exemple, faire en sorte que demain chaque conseiller Pôle Emploi explicite aux chercheurs d’emploi qu’il accompagne les possibilités d’engagement citoyen dont ils disposent et les oriente vers les bons acteurs : des associations locales, des plateformes ou d’autres intermédiaires. A horizon dix ans, je rêve d’une société plus solidaire, avec davantage de citoyens qui se sentent légitimes et qui agissent pour faire bouger les lignes dans le bon sens.

Une rencontre marquante/décisive pour grandir ?

Celle avec mon fils, qui a maintenant quatre ans et demi. Outre le bonheur – indescriptible – d’être parent, cela a généré chez moi un immense sentiment de responsabilité vis-à-vis du monde où il allait grandir, et de l’exemple que je lui donnais au quotidien.  J’ai choisi un travail à impact qui me passionne. Je l’ai fait pour moi, mais je suis heureuse qu’il voie et qu’il sache, dès l’enfance, que le travail peut être un lieu d’impact et un lieu de passion.

Ses réalisations

Photo d'une action collective
Alors que la période de chômage fragilise les chercheurs d’emploi et les expose à de multiples risques psycho-sociaux, Transitions à Impact propose de changer la donne. Le principe ? Rendre l’engagement citoyen accessible aux chercheurs d’emploi à travers une multiplicité d’actions solidaires et les accompagner durant tout le parcours. Se sensibiliser aux enjeux du handicap, organiser une collecte de vêtements pour les plus précaires, donner son sang, mentorer un jeune défavorisé, imaginer un projet citoyen pour aider les personnes isolées…Ce sont des exemples d’actions solidaires proposées par Transitions à Impact, un projet imaginé par la Fondation de l’Engagement pour tous et l’association Activ’Action.